Le 11 janvier dernier, la Cité Internationale de Lyon accueillait le 15ème Concours International du Gamay. Il a réuni 727 cuvées provenant de 4 pays différents (France, Suisse, Italie et Canada). Après avoir mis à l’honneur un Côte de Brouilly en 2023 puis un Moulin-à-Vent l’année précédente, c’est un Beaujolais Villages qui remporte le titre de Meilleur Gamay du monde cette année !
C’est une occasion unique pour de nombreux professionnels du vin et amateurs éclairés, d’endosser le rôle de juré face à une large sélection de gamay. Ils étaient 150 ce 11 janvier, afin de déguster à l’aveugle les 727 cuvées inscrites au concours. Cette première dégustation a permis de départager médailles d’or et d’argent.
Suite à cette sélection, c’est au tour du « grand jury » constitué de 5 experts (un professeur de sommellerie, un œnologue, un restaurateur, une caviste, une sommelière), de déguster de nouveau à l’aveugle les médaillés d’or afin d’attribuer le titre du « Meilleur Gamay du Monde ».
228 gamays médaillés
Cette année, les experts ont décerné 228 médailles. 92 médailles d’Or et 136 médailles d’Argent ont été attribuées aux meilleurs gamays de cette dégustation.
Le Meilleur Gamay du Monde est un Beaujolais Villages
Le trophée du « Meilleur Gamay du Monde » 2025 a été attribué au Beaujolais Villages, cuvée du Relais 2023 du Relais du Colombier.
Situé à Marchampt, le Relais du Colombier est aux mains de Véronique et Laurent Ducrot depuis plus de 30 ans. Le couple travaille 7 hectares de vignes en Beaujolais et Beaujolais Villages, exploitées depuis la 5ème génération. Ensemble, ils accueillent également les touristes de passage dans leurs chambres d’hôtes.
A quoi ressemblera la viticulture de demain ? Nous avons interrogé les chercheurs de la SICAREX Beaujolais, de l’IFV et de la Chambre d’agriculture du Rhône. Une prospective basée sur leurs travaux de recherches et précieuses connaissances.
Haut lieu de la recherche vitivinicole, le Beaujolais compte une quinzaine de chercheurs dédiés à des travaux sur la vigne et le vin. Par exemple ? Etudes du matériel végétal, création variétale, calcul d’empreinte carbone, expérimentations agronomiques mais aussi étude des attentes des consommateurs et des professionnels… Quatre experts, basés en Beaujolais, nous partagent le fruit de leurs recherches et leur vision de la viticulture de demain.
Demain, une viticulture à la fois résiliente et propre
«La viticulture de demain doit être en capacité d’être résiliente face aux évolutions climatiques et aux aléas qu’elles occasionnent. Nous avons utilisé des béquilles qui de fait sont de moins en moins acceptées. À l’avenir, il faudra être en capacité de faire sans, autrement dit de produire plus propre ».
Bertrand Chatelet, Directeur de la SICAREX Beaujolais et du pôle Beaujolais-Bourgogne-Jura-Savoie de l’IFV
Demain, un vignoble intégrant des variétés résistantes
«Depuis quelques années, nous creusons la piste d’intégrer d’autres cépages, afin de pallier les difficultés occasionnées par le réchauffement climatique. L’idée est de trouver des variétés résistantes aux maladies et aux nouvelles conditions climatiques qui conservent des qualités organoleptiques. Si je pense qu’elles vont se développer, elles ne pourront en réalité pas constituer la majorité du vignoble dans un futur proche. Les cahiers des charges des appellations, parties intégrantes du patrimoine, sont basés sur des cépages historiques et ils vont être adaptés très progressivement ».
Taran Limousin, ingénieur matériel végétal, Pôle Beaujolais-Savoie de l’IFV
Taran Limousin, ingénieur matériel végétal, Pôle Beaujolais-Savoie de l’IFV
«Le vignoble français a une force extraordinaire du fait d’être un vignoble d’appellations. La viticulture de demain va continuer à s’appuyer sur elles. En Beaujolais, Il va donc falloir trouver des solutions pour continuer à cultiver le gamay. Même si on l’associe à d’autres variétés minoritaires, le gamay a de beaux jours devant lui ! »
Bertrand Chatelet, Directeur de la SICAREX Beaujolais et du pôle Beaujolais-Bourgogne-Jura-Savoie de l’IFV
«Connaître la composition des sols, fertiliser grâce à la matière organique, gérer les couverts végétaux pour lutter contre la sécheresse… la question du sol est plus que centrale aujourd’hui. Elleva d’après moi revenir au goût du jour. Le Beaujolais a mené un formidable travail de recherche sur les sols pendant des années. Il permet aujourd’hui une connaissance fine des terroirs. Le fruit de cette cartographie des sols a permis de vraies avancées, qui emmènent d’ailleurs le Beaujolais vers une montée en gamme ».
Thibault Laugaa, responsable de l’équipe viticulture à la chambre d’agriculture du Rhône. Il chapeaute une équipe d’une dizaine de conseillers qui sillonnent le Beaujolais et accompagnent ses viticulteurs
Demain, des consommateurs avertis
«Vin bio, biodynamique, nature, sans sulfite ajouté… nous voyons qu’il y une grande incompréhension dans l’esprit des consommateurs. Nos études nous ramènent très souvent à la communication et à la complexité du langage et des informations communiquées. Les consommateurs d’aujourd’hui (et de demain) sont en demande de transparence sur ce qu’ils boivent. Par ailleurs, ils semblent souhaiter des vins moins transformés ».
Carole Honore-Chedozeau, œnologue et chercheuse, Pôle Sensoriel IFV-SICAREX Beaujolais
Réchauffement climatique, évolution des pratiques et des attentes des consommateurs… la viticulture traverse d’ores et déjà de nombreux challenges. Grâce à leur travail, les chercheurs esquissent des réponses aux questions que se posent les professionnels de la filière. La viticulture de demain s’invente dès aujourd’hui en s’appuyant sur la recherche. Le Beaujolais prend sa part dans ce défi grâce aux travaux des équipes d’Inter Beaujolais, de la SICAREX Beaujolais, de l’IFV et de la Chambre d’agriculture du Rhône.
En Beaujolais, la fibre pour la recherche viticole ne date pas d’hier. Insufflée par l’ingénieur et homme d’affaire Victor Vermorel à la fin du XIXème siècle, elle œuvre aujourd’hui encore pour l’amélioration de la qualité des vins mais aussi des pratiques agronomiques. Pleine de challenges, la viticulture de demain s’invente dès aujourd’hui grâce aux travaux des chercheurs du Beaujolais. Présentation des métiers et des projets d’étude en cours dans le vignoble.
Le Beaujolais, territoire historiquement à la pointe de la recherche sur la vigne et le vin
Victor Vermorel – Archives Senat.fr
D’où vient la fibre beaujolaise pour la recherche viticole ?
Si la recherche sur la viticulture en Beaujolais avait un visage, ce serait celui de Victor Vermorel. Enfant des bords de Saône, le chercheur a fait avancer la connaissance sur la viticulture tout au long de sa vie. Visionnaire, celui qui prônait « le progrès par l’expérience » a fait du Beaujolais un haut lieu de la recherche vitivinicole.
Victor Vermorel a marqué les vignerons de la fin du XIXème siècle grâce à ses multiples inventions. Il est notamment, avec Pierre Viala, l’auteur de l’ouvrage historique « L’Ampélographie. Traité général de viticulture ». Paru en 1900, celui-ci documente et illustre les 5 200 cépages répertoriés dans le monde et est encore aujourd’hui une référence.
L’Ampélographie. Traité général de viticulture, Victor Vermorel et Pierre Viala, 1900
Illustration du cépage gamay, L’Ampélographie. Traité général de viticulture, Victor Vermorel et Pierre Viala, 1900
Illustration du cépage chardonnay, L’Ampélographie. Traité général de viticulture, Victor Vermorel et Pierre Viala, 1900
Entre 1888 et 1897, Victor Vermorel a imaginé les lieux de recherche sur la vigne et le vin que nous connaissons aujourd’hui en Beaujolais. Il a créé la toute première station viticole au 210 boulevard Vermorel à Villefranche-sur-Saône. Cette adresse, où travaillent toujours les chercheurs, était initialement composée de laboratoires, d’une impressionnante bibliothèque mais aussi d’une mini-cuverie… L’entrepreneur a également fait du Château de l’Eclair, à Liergues, un domaine viticole expérimental. A l’époque, ces lieux suscitent la curiosité et des chercheurs du monde entier viennent les visiter.
Des structures de recherche interconnectées en Beaujolais
Vous l’aurez compris, l’héritage de Victor Vermorel a donné sa forme actuelle à la recherche en Beaujolais. Son originalité ? Plusieurs organisations interconnectées qui travaillent main dans la main. Inter Beaujolais (organisation chargée du développement de la filière viticole) compte la recherche et l’expérimentation parmi ses missions. Celles-ci sont assurées par la SICAREX Beaujolais (Société d’Intérêt Collectif Agricole de Recherches et d’EXpérimentations) notamment grâce à un domaine viticole expérimental de 20 hectares. Le centre de recherche travaille en étroite collaboration avec le Pôle Bourgogne Beaujolais Jura Savoie de l’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV). Implanté en 18 unités dans les régions viticoles françaises, ce dernier compte une équipe de 9 chercheurs dans le Beaujolais. Ces trois organisations sont toutes situées à la même adresse, surnommée le « 210 en Beaujolais » à Villefranche-sur-Saône.
La SICAREX Beaujolais et l’IFV réalisent nombre de leurs expérimentations sur la vigne et le vin au Château de l’Eclair. Ledomaine, autrefois investi par Victor Vermorel, est aujourd’hui surnommé le « laboratoire à ciel ouvert du Beaujolais ». Bien que basées dans le Rhône, les équipes de la SICAREX Beaujolais et de l’IFV travaillent sur des projets à l’échelle locale, nationale et internationale. Les travaux de recherche ne se cantonnent pas aux enjeux régionaux. Ils concernent bien souvent le vignoble français dans son ensemble.
Sur le terrain, la chambre d’agriculture du Rhône se charge de transmettre aux vignerons, domaines et caves du Beaujolais les résultats de la recherche. Cela passe notamment par la formation, l’organisation de rencontres techniques ou encore l’animation de groupes de vignerons (Vigneron·ne·s du Vivant en Beaujolais par exemple).
Bouteilles consignées, exemple d’un sujet de recherche transverse
En Beaujolais, la recherche implique bien souvent à la fois la SICAREX Beaujolais, l’IFV, lnter Beaujolais et le Château de l’Eclair. C’est le cas par exemple pour une expérimentation sur le réemploi des bouteilles entamée en 2023.
Le saviez-vous ? Les calculs de l’IFV ont démontré que le conditionnement représente 40 % à 50 % de l’empreinte carbone globale de la filière. Pour réduire cet impact majeur il faut soit opter pour des bouteilles plus légères soit adopter un système de consigne.
Afin de fournir des données et un retour d’expérience, des recherches sont menées en Beaujolais à tous les niveaux. Le Pôle sensoriel de la SICAREX Beaujolais étudie l’image de la consigne auprès des acteurs de la filière. En parallèle, Inter Beaujolais établit un observatoire de la qualité des vins et du poids des bouteilles. Et enfin, le Château de l’Eclair commercialise une cuvée test de Beaujolais Nouveaux consignés. Les premiers retours d’expérience sont disponibles dans un livre blanc édité en fin d’année.
La recherche en Beaujolais aujourd’hui : projets et innovations
Empreinte carbone, adaptation au réchauffement climatique, cépages résistants, attentes des consommateurs… les grands axes de recherche en Beaujolais
L’enjeu du siècle pour la viticulture va être de s’adapter à la nouvelle donne dictée par le réchauffement climatique. Ainsi, les travaux de recherche en Beaujolais visent avant tout à orienter les acteurs de la filière dans ce contexte. Cela peut être par la mesure d’empreinte carbone, des expérimentations agronomiques, l’exploration du matériel végétal ou encore l’étude des goûts des consommateurs…
« Notre métier est de répondre aux questions que se posent les professionnels. Elles sont le reflet des attentes sociétales et des besoins du secteur ».
Basé en Beaujolais, le Pôle Évaluation Environnementale de l’IFV étudie l’impact de la filière avec pour objectif de trouver des moyens de l’atténuer. Ce pôle s’applique à mesurer l’empreinte carbone des exploitations viticoles et met en perspective les données liées à chaque étape du cycle de vie du vin. Il réalise une veille constante et étudie de près les différentes pratiques pour orienter les professionnels cherchant à réduire l’empreinte carbone de leur entreprise.
Adapter les pratiques viticoles face au réchauffement climatique
L’adaptation au changement climatique est aussi un sujet de recherche pour le Pôle technique de l’IFV Beaujolais-Savoie. Des expérimentations agronomiques sont menées, dans le but de maintenir un rendement et une qualité de vin malgré le changement climatique. Le rôle de ces recherches est de proposer des solutions progressives et notamment des leviers d’actions à court terme (filets d’ombrage, modification du feuillage…) tout en gardant un oeil sur les solutions à plus long terme (cépages résistants notamment).
Les chercheurs de la SICAREX Beaujolais remplissent encore aujourd’hui l’une de ses missions historiques : la sélection et la préservation de la diversité génétique du gamay. Ils entretiennent un impressionnant conservatoire composé de plus de 1 000 gamay différents (originaires d’Italie, de Suisse, du Sud-Ouest…). Ce travail de préservation du végétal va encore plus loin avec le projet “Qanopee”. Porté par les vignobles du Beaujolais, de la Champagne et de la Bourgogne, il cherche à pré-multiplier des pieds de vignes sains dans une serre bioclimatique de 4 500m2. L’objectif ? Sécuriser le patrimoine végétal des vignobles.
La création variétale est un “fil rouge” pour la SICAREX Beaujolais d’après son directeur, Bertrand Chatelet. Dès les années 70, le centre de recherche rejoint un programme inédit de l’INRAE et devient une référence en la matière. Travail au long court, la sélection variétale s’appuie notamment sur l’observation et la comparaison des 180 variétés de raisins plantées sur une parcelle du Château de l’Eclair. La SICAREX Beaujolais a notamment créé le gaminot, croisement entre le gamay et le pinot noir. Aujourd’hui, les équipes concentrent leurs recherches sur des variétés à la fois tolérantes aux maladies cryptogamiques et à la sécheresse. Certains cépages résistants créés sont d’ores et déjà plantés en Beaujolais. Le gamaret ou le voltis pour ne citer qu’eux, pourraient d’ailleurs rentrer dans le cahier des charges des appellations.
Identifier les attentes des consommateurs de demain
Afin de produire des connaissances pour la science et l’ensemble de la filière, un pôle d’analyse sensorielle a vu le jour en 2023. Son équipe d’ingénieurs mène des projets de recherche qui intéressent bien au-delà du vignoble beaujolais et même français. Ils mettent au cœur de la recherche le jugement sensoriel des consommateurs notamment via des groupes focus et des dégustations. Débuté en 2020, l’un des projets phares du pôle concerne la perception des vins sans sulfites ajoutés. Les conclusions de cette étude, menée auprès d’un panel de consommateurs et de professionnels, sortiront fin 2024.
Zoom sur GES&Vit, le premier outil de calcul d’empreinte carbone viticole, né en Beaujolais
Le Pôle Évaluation environnementale a mis les bouchées doubles pour répondre au besoin pressant de mesure de l’empreinte carbone des acteurs de la viticulture. Il a été le premier à proposer dès 2021 le premier outil capable de le faire. Baptisé GES&Vit, celui-ci a pour ambition d’appuyer la filière vin dans sa transition bas carbone.
GES&Vit permet de poser un diagnostic sur les pratiques en place mais aussi de simuler différents modes de conduite de la vigne. Enfin, il donne les moyens d’agir grâce à un plan d’action visant à réduire l’empreinte carbone d’une exploitation viticole. Accessible sous réserve que l’on ait suivi une formation de prise en main, l’outil s’adresse à des conseillers et techniciens viticoles. De nombreux professionnels en France l’ont d’ores et déjà adopté.
Si Victor Vermorel a créé un terreau fertile pour la recherche viticole en Beaujolais, sa filière vin a su se structurer pour lui faire porter des fruits. C’est main dans la main que les équipes d’Inter Beaujolais, de la SICAREX Beaujolais, de l’IFV et de la Chambre d’agriculture du Rhône la font perdurer avec passion. Ancrés dans leur époque, leurs travaux de recherche sont des mines d’informations pour construire le vignoble de demain.
Le lundi 16 septembre, le restaurant (et Bistrot Beaujolais) La Bonne Franquette a accueilli une quarantaine de professionnels, rassemblés pour la 3ème édition de la sélection de Montmartre. Organisée en partenariat avec l’Association des Sommeliers de Paris et d’Île-de-France, cette sélection a regroupé 163 cuvées de Beaujolais et Beaujolais Villages.
Plus de 40 dégustateurs engagés
Cavistes, restaurateurs, sommeliers et journalistes étaient au rendez-vous pour déguster les cuvées présentées de vins rouges, blancs et rosés.
Les jurés, répartis par table au préalable, on découvert entre 10 et 15 cuvées à l’aveugle. Leur objectif : dénicher les pépites de cette sélection. Tous dégustaient sous la haute autorité de l’Association des Sommeliers de Paris et d’Île-de-France, représentée par Kosta Anagnostopoulos, maître sommelier, et Jean-Luc Jamrozik, président.
Par la suite toutes les cuvées dégustées ont été désanonymisées puis mises à disposition pour une dégustation libre. Les jurés ont comparé leurs impressions lors de ce temps d’échanges enrichissant.
Ce temps de dégustation s’est ensuite prolongé lors du déjeuner, dans l’ambiance chaleureuse de La Bonne Franquette.
A l’issue de cette dégustation, une liste sans classement a émergé. Elle constitue une sélection de cuvées coups de cœur. Les choix des jurés, sont susceptibles d’inspirer autant les professionnels en quête de nouvelles références que les amateurs souhaitant des recommandations.
Au total, parmi les 163 échantillons dégustés rigoureusement, ce sont 51 cuvées qui font la sélection de Montmartre des Beaujolais et Beaujolais Villages 2024.
Pissevieille, Côte du Py, La Madone, Champ de Cour… Avez-vous déjà prêté attention à ces inscriptions sur les bouteilles des crus du Beaujolais ? Que vous soyez familier ou non avec la notion de “vins de lieux”, nous vous expliquons ce qui se cache derrière, à l’heure où plusieurs crus caressent l’espoir de voir naître des premiers crus en Beaujolais.
Le Beaujolais, candidat aux premiers crus ? C’est en tout cas le chemin qu’empruntent certains des dix crus du vignoble. Les lieux-dits, entités géographiques reconnues dans le cadastre, étaient déjà recensés sur les cartes il y a plus de deux siècles. Aujourd’hui, les vignerons cherchent à faire reconnaître ces terroirs particuliers. Jusqu’à franchir la marche du classement en premier cru ? Retour sur cette démarche de longue haleine dont l’avancement varie selon les crus.
Beaujolais : un vignoble fait de crus et de lieux-dits
Lieu-dit et premier cru, ça vous parle ?
Tout d’abord, que sont les lieux-dits et que signifie premier cru ? En ce qui concerne le vin, les lieux-dits sont un terroir précis et cadastré à l’intérieur d’une zone d’appellation. On en répertorie près de 600, rien que sur le secteur des crus du Beaujolais et chacun d’eux donne vie à des cuvées typiques. Les vignerons sont de plus en plus nombreux à en faire mention sur leurs étiquettes. Ensuite, un premier cru est un échelon supérieur aux crus dans la hiérarchie des vins. Il permet de reconnaître un terroir d’exception et des pratiques encadrées.
La mosaïque des sols du Beaujolais
Si la variété des terres du Beaujolais n’a pas échappé aux vignerons d’hier et d’aujourd’hui, c’est une véritable mosaïque des solsqui a été mise en lumière en 2018. En effet, une étude inédite -qui a duré 9 ans- a révélé plus de 300 types de sols issus de 15 grandes familles de roches. Pas étonnant donc que les vins du Beaujolais soient si différents, non seulement d’une AOC à une autre mais aussi d’un lieu-dit à un autre.
Des lieux-dits ancestraux
Les lieux-dits présents sur les 12 appellations sont un héritage viticole du Beaujolais. Des “porteurs de mémoire” racontent encore les anecdotes liées à ces endroits baptisés selon un fait historique, un patronyme ou encore une caractéristique naturelle du terrain. On retrouve d’ailleurs mention de certains lieux-dits sur d’anciennes cartes, étiquettes et déclarations de récoltes… La carte Budker de 1869 notamment recensait déjà pas moins de 200 lieux-dits ! En d’autres termes, l’approche parcellaire en Beaujolais ne date pas d’hier.
Pourquoi le Beaujolais cherche-t-il à avoir ses premiers crus ?
Le parcellaire, partie intégrante de l’identité du Beaujolais
Qu’ils présentent leurs “cuvées lieux-dits” ou que leurs bouteilles en portent le nom, les vignerons du Beaujolais sont de plus en plus nombreux à avoir recours, comme leurs ancêtres, au parcellaire. En effet, conscients de la variabilité des sols qu’ils travaillent mais également décidés à proposer des gammes de vins singulières, ils créent des cuvées voire des micro-cuvées pour révéler le potentiel de chaque lieu-dit. Certains parlent alors de “vins de lieux”.
Premier cru : une démarche de montée en gamme portée par les vignerons
Ce sont les vignerons de chaque appellation eux-mêmes qui portent le projet de doter certains vins de la mention premier cru. Leur motivation ? L’envie que l’on considère leslieux-dits remarquables du Beaujolais à leur juste valeur et que leurs spécificités soient désormais reconnues. Enfin, dans la mesure où la présence de premiers crus est un gage de qualité pour le vignoble tout entier, c’est le Beaujolais dans son ensemble qui fera ainsi reconnaître sa montée en gamme.
Comment choisir les lieux-dits candidats aux premiers crus ?
Les vignerons ont sélectionné les lieux-dits susceptibles de devenir de premiers crus grâce à une méthode validée par l’Institut National de l’Origine et de la Qualité(INAO). Afin de justifier ces potentielles montées en gamme, l’institut exige la prise en compte des critères suivants :
revendication : les vignerons du lieu-dit le mentionnent-ils déjà sur leurs bouteilles et le revendiquent-ils à la récolte ?
notoriété historique : le lieu-dit est-il présent dans les archives (cartes, livres…) ?
notoriété contemporaine: les guides, magazines et concours le mentionnent-ils ?
dégustation : le lieu-dit a-t-il des typicités propres à la dégustation par rapport à l’appellation générique ? Lesquelles ?
valorisation : la mention du lieu-dit sur la bouteille lui donne-t-elle plus de valeur ? Met-elle en lumière l’attention particulière portée par le vigneron sur cette cuvée ? En d’autres termes, une cuvée “lieu-dit” est-elle valorisée économiquement ?
C’est l’évaluation de ces critères qui permet de classer les lieux-dits entre eux et, au final, de porter la candidature des mieux notés.
Qui dit premier cru dit pratiques encadrées
Mais en fait, qu’implique un classement en premier cru ? La montée en gamme s’accompagne de l’adoption de pratiques plus restrictives que pour le reste de l’appellation. Par exemple ? Les premiers crus demandent entre autres de diminuer les rendements lors de la récolte ou d’allonger la durée d’élevage des vins.
Afin d’harmoniser les démarches, un cahier des charges premier cru socle a été créé. Il est basé sur les pratiques recensées auprès des vignerons de chaque appellation. Les crus candidats à la montée en gamme sont libres d’aller plus loin.
Fleurie, Brouilly et Moulin-à-Vent candidats aux premiers crus
Où en sont les dix crus ?
Si les dix crus mettent en valeur leurs terroirs depuis toujours, c’est depuis 2019 qu’ils se sont tous engagés dans une démarche de reconnaissance de leurs lieux-dits, afin de définir avec plus de précision chaque terroir.
Ce travail pourra aboutir à terme à une reconnaissance de certains d’entre eux en premiers crus. Ce sera le cas prochainement pour Fleurie, Brouilly, Moulin-à-Vent, Côte de Brouilly et Juliénas. Pour les cinq autres, le travail de collecte de données se poursuit.
Les lieux-dits candidats aux premiers crus
Ce sont d’abord les vignerons de Fleurie qui ont ouvert la voie des candidatures aux premiers crus. Ils ont été suivis quelques mois plus tard par ceux de Brouilly et Moulin-à-Vent. Ils ont adopté la procédure de l’INAO afin de pouvoir arrêter une liste de lieux-dits à valoriser. Les candidats au titre de premiers crus votés en assemblée générale sont :
7 lieux-dits sur le cru Fleurie : Grille Midi, La Chapelle des Bois, La Madone, La Roilette, Les Garants, Les Moriers, Poncié
16sur le cru Brouilly : Briante, Combiaty, Combiliaty, Garanches, La Chaize, La Martingale, La Perrière, La Terrière, Les Maisons neuves, Marquisat, Pierreux, Pissevieille, Reverdon, Saburin, Saint Pierre, Voujon
14 sur le cru Moulin-à-Vent : Au Michelon, Aux Caves, Carquelin, Champ de Cour, Chassignol, La Roche, La Rochelle, La Tour du Bief, le Moulin-à-Vent, Les Perrelles, Les Rouchaux, Les Thorins, Les Verillats et Rochegrès.
Et maintenant ?
Si le plus gros du travail a été mené par les vignerons, les crusFleurie, Brouilly et Moulin-à-Vent n’en sont pour autant qu’au début du parcours. Le dossier déposé par Fleurie est à l’étude par l’INAO, tandis que ceux de Brouilly et de Moulin-à-Vent sont en cours de finalisation.
L’organisme administrateur des appellations d’origine débute son étude une fois le dépôt officiel des dossiers. Celle-ci peut prendre plus de dix ans et l’INAO peut y apporter de multiples ajustements. Patience donc, avant de voir naître pour de bon les premiers crus du Beaujolais !
Les étapes vers la reconnaissance des premiers crus
2009 – 2018 : étude inédite de caractérisation des terroirs du Beaujolais par le Cabinet d’étude pédologique Sigales
2017 : lancement d’un projet de montée en gamme commun aux 10 Crus
Avril 2019 : création d’une méthode de travail afin de déterminer les lieux-dits candidats au classement en premier cru.
2019 – 2024 : enquêtes de pratiques, création de fiches lieux-dits, dégustations mensuelles orchestrées par chaque cru.
28 mars 2023 : vote en assemblée générale du cru Fleurie pour 7 lieux-dits candidats
16 octobre 2023 : vote en assemblée générale du cru Brouilly pour 16 lieux-dits candidats
22 novembre 2023 : Fleurie dépose officiellement son dossier auprès de l’INAO
19 décembre 2023 : vote en assemblée générale du cru Moulin-à-Vent pour 14 lieux-dits candidats
Courant 2024 : dépôts officiels des dossiers pour les crus Brouilly et Moulin-à-Vent.
Horizon 2035 : officialisation des lieux-dits dotés du classement en “premiers crus”
Désormais, les lieux-dits du Beaujolais et leur potentiel pour viser les premiers crus n’ont plus de secrets pour vous.
Avec cette démarche de montée en gamme, les dix crus reconnaissent que le Beaujolais possèdeun trésor sous ses pieds (de vignes!)et partagent un objectif : définir avec plus de précision chaque terroir.
Cette réappropriation par les vignerons de leurs lieux-dits est d’ores et déjà en train de changer le visage du vignoble du Beaujolais.
Le samedi 13 janvier dernier, le 14ème Concours International du Gamay se déroulait à la Cité Internationale de Lyon. 811 cuvées provenant de 4 pays différents (France, Suisse, Italie, Brésil) se sont disputé le titre tant convoité. Et après un Brouilly en 2022, puis un Côte de Brouilly l’an dernier, c’est un Moulin-à-Vent qui a remporté le trophée !
C’est un rendez-vous à ne pas manquer pour certains professionnels du vin et amateurs éclairés. 181 d’entre eux étaient attendus ce 13 janvier afin de déguster à l’aveugle les très nombreuses cuvées inscrites au concours. Une première dégustation a permis de départager médailles d’or et d’argent.
A l’issue de cette sélection, un grand jury composé d’experts (un professeur de sommellerie, un œnologue, un restaurateur, une caviste, une sommelière) a dégusté de nouveau à l’aveugle les cuvées médaillées d’or afin de déceler la meilleure. C’est donc finalement le Moulin-à-Vent cuvée Vieilles Vignes 2023 du Domaine de Colonat qui a été élu Meilleur Gamay du Monde 2024.
267 gamays récompensés par une médaille
267 médailles, dont 164 Or et 103 Argent, ont été octroyées aux meilleurs gamays de cette dégustation. Le jury a également décerné une mention spéciale au meilleur vin suisse : l’AOC Coteau de Peissy, Domaine des Charmes, Le Baron Rouge Vieilles Vignes 1er cru 2022, 100% gamay.
Moulin-à-Vent Vieilles Vignes 2023 – Domaine de Colonat
Julie et Thomas Collonge
Le Meilleur Gamay du Monde est un Moulin-à-Vent
Le trophée du « Meilleur Gamay du Monde » 2024 a été attribué au Moulin-à-Vent Vieilles Vignes 2023 du Domaine de Colonat.
Vignerons depuis 9 générations, la famille Collonge exploite 12 hectares de vignes et produit des vins en AOC Morgon, Moulin-à-Vent, Chiroubles, Brouilly, Régnié et Beaujolais blanc. Après des études en viticulture-oenologie, Thomas se forme en France et à l’étranger, puis rejoint le domaine familial. S’en suivent 10 années de transmission de savoir-faire auprès de ses parents. Depuis 2018, Julie et Thomas Collonge continuent de développer le domaine. La connaissance de leurs meilleurs terroirs leur permet notamment de proposer 5 cuvées parcellaires, en AOC Moulin-à-Vent et Morgon.
« Nous avons identifié au Domaine de Colonat trois éléments qui nous semblent essentiels pour produire des grands vins : nos vieilles vignes, le choix de la date de récolte et le tri des raisins à la récolte. » confie Thomas Collonge.
On retrouve dans cette cuvée trois lieux-dits de l’appellation Moulin-à-Vent : les Greneriers, Bois Pontdevaux et Maison Neuve. Les terroirs argilo-granitiques offrent une disponibilité hydrique limitée mais régulière aux vignes âgées de 61 à 93 ans. L’élevage a été réalisé en cuve béton afin de préserver le fruité et la fraîcheur.
L’appellation Moulin-à-Vent fête son centenaire en 2024 : retrouvez toutes leurs actualités à cette adresse.
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